BREVES EN FOLIE : LE SEUL BLOG OU LE FOND PRIME SUR LA FORME

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PORTRAITS CHOISIS (17)

 

LE SYNDROME DE L'URTICAIRE

(17) 

 

 

 

 

 

 

PORTRAITS CHOISIS

 

 

Eugénie POLYCLETTE apparaît dans le sas de la porte d’entrée et manifestement elle semble avoir quelques problèmes avec son parapluie noir déglingué qui refuse de se fermer.

 

Elle s’acharne dessus, le secoue vigoureusement de haut en bas, au risque d’éborgner quelqu’un, elle martèle violemment le sol de ce vieux pépin, conjuguant quelques  restes de vitalité et l’énergie du désespoir.

 

Mlle POLYCLETTE, vieille fille, octogénaire décrépite, édentée mène un tapage hors de proportion avec ses activités financières et son patrimoine qui sont insignifiants et quasiment nuls.

 

A la rubrique profession sur son carton de signature, on peut lire : technicienne de surface.

Henry a appris par la bande, la rumeur et de source sûre, qu’elle étaitDAME-PIPI dans un W.C  parisien du côté du Sacré Coeur et qu’elle s’est retirée à  SAINT ETIENNE, pour y couler une retraite paisible loin des odeurs d’urine et de grésil.

 

 

 

Hormis une pension de réversion servie trimestriellement par la célèbre Caisse de Retraites A.G.R.R, elle ne dispose que de peu de revenus, ce qui n’est pas une tare en soi.

Elle vit plus que chichement mais s’évertue à laisser croire qu’elle se déplace en grand équipage et que le roi n’est pas son cousin !

Relativement grande, filiforme, c’est une vieille ascète atrabilaire qui s’étiole de jour en jour.

Sanglée et corsetée dans une robe noire qui descend à mi-mollets, elle porte des chaussures à semelles compensées marron clair, énormes et larges qui ressemblent d’avantage à des Groles de clown qu’aux escarpins de verre de Cendrillon.

Elle semble désarticulée, comme une marionnette dont on aurait coupé les fils. Son teint est cireux et sa bouche étroite encadrée de rides verticales évoque irrésistiblement le cul d’un poulet Douce France. Sa mâchoire inférieure est agitée de mouvements convulsifs dès qu’elle s’adresse à Henry.

Elle coupe les cheveux en quatre, ergote, mégote, radote.

Elle feint de s’intéresser à un quotidien financier mais aucune bribe de conversation ne lui échappe. Elle paraît avoir conservé une ouïe particulièrement fine et Henry qui se méfie d’elle comme de la peste évite de marmonner ne serait-ce que le quart du début de la moindre remarque désobligeante dont elle pourrait immédiatement prendre ombrage et se plaindre à la direction.

Sa voix suraiguë ressemble au cri du héron cendré dont elle possède le cou décharné. Elle collectionne avec un plaisir évident, depuis des années, toutes les affections pathogènes sauf le sida, cela va de soi, que la médecine a pu recenser : le lundi, elle est fatiguée, le mardi patraque, le mercredi éreintée, le jeudi chancelante, le vendredi agonisante, le samedi moribonde et le dimanche, jour du Seigneur, à l’article de la mort !

Bref, elle empeste le suppositoire et l’embrocation.

Elle réfléchit longuement à la question insidieuse qu’elle pourrait poser.

En manque de griefs, elle extirpe de son sac en croco, une dizaine de bons à lots de la SNCF qui gagnent enfin, déclame-t-elle : 8 coupons de voyage de 100 Kilomètres chacun !

Elle va pouvoir enfin réaliser le vieux rêve de dévote qu’elle caressait en secret dans son pissoir de banlieue : se rendre à LOURDES, visiter la grotte et faire trempette dans la piscine.

 

 

 

Marius LEMPEGUE est un sexagénaire ventripotent qui possède des abdominaux de comptoir impressionnants. Cette bedaine protubérante qui dégouline est freinée dans sa chute par un énorme ceinturon qui ressemble à la sous-ventrière d’un percheron.

Son physique ingrat est un défi à la nature. Il a l’air d’un brontosaure rescapé du crétacé inférieur. Ses yeux exorbités sont si rapprochés l’un de l’autre, qu’ils semblent n’en faire qu’un : cyclopéen !

Bien que la nature l’ait doté d’une paire d’oreilles impressionnantes, Monsieur LEMPEGUE est sourd comme un pot et comme une catastrophe écologique en cache bien souvent une autre, on l’a appareillé d’un sonotone relativement ancien qui siffle et crachote comme un  poste à galène.

Les ondes hertziennes sont par nature volatiles et capricieuses, pourtant Henry qu’on ne peut taxer d’intempérance ni soupçonner d’être un affabulateur, a cru entendre distinctement, un matin de juillet, quelques notes d’une chanson de Mireille Mathieu relayées et distillées par le sonotone du père LEMPEGUE.

Après consultation d’un radio-amateur éclairé à qui il a rapporté ce phénomène paranormal, on a bien a été obligé d'admettre que sous certaines conditions atmosphériques particulièrement favorables,  les quelques cheveux hirsutes qui parsèment le crâne de Marius LEMPEGUE s’étaient comportés à la manière de minuscules antennes, le sonotone se chargeant d’amplifier plus ou moins les signaux reçus : un ersatz de walkman en quelque sorte.

Les collègues  d’Henry, jamais à court d’idées ont suggéré depuis d’équiper le père LEMPEGUE d’un tube cathodique et d’une parabole pour capter Canal Plus !

Quoiqu’il en soit et plus prosaïquement du strict point de vue de l’exploitant,  ce vieux fossile reste obstinément sourd aux sollicitations d’Henry.

 

 

M. Hassi TIMTOUCHE, maghrébin bon teint est parfumé comme une midinette, ses cheveux gras sont noircis au henné, son visage étonnamment creusé et émacié semble taillé à coups de serpette.

On ne saura jamais s’il est à voile ou à vapeur et si cette minceur ascétique est due à une eau de toilette super corrosive ou bien à un régime essentiellement végétarien à base de pois chiches, de semoule, de concombres et de radis noirs.

 

 

Mme et M. ZOLTAN vivent apparemment heureux et cachés dans une caravane délabrée sur un terrain vague de la banlieue stéphanoise, sans eau, sans électricité et sans gaz, dans le dénuement le plus complet.

Enfin c’est ce qui se raconte, personne n’est allé vérifier sur place.

Ils n’ont par conséquent si l’on en croit ces ragots, venus d'on ne sait d'où absolument rien à faire domicilier sur leur compte joint.

Ils possèdent cependant chacun, cruelle ironie d’une campagne menée tambour battant par un exploitant particulièrement pugnace, perspicace et vraisemblablement atteint de sinusite chronique : un plan d’épargne logement !

On ne pourrait que se réjouir d’une telle adéquation entre un produit et sa cible si Mme et M. ZOLTAN n’éprouvaient vis à vis de l’eau, du savon et de la toilette intime en général, une aversion quasi-viscérale.

C’est le sauve qui peut général quand Mme ZOLTAN se présente au guichet pour prendre quelques nouvelles de cette épargne qu’elle thésaurise assidûment.

Les guichetiers découvrent subitement qu’ils ont quelque chose d’urgent à faire et se dispersent comme une volée de moineaux.

Malheur à celui qui sommeillait et qui n’a pas entendu sonner le tocsin, il est obligé de travailler en apnée pour échapper au mélange indéfinissable de relents de vespasienne, d’odeur d’ail et d’effluves marins nauséabonds qu’elle dégage !

 

 

 

 

( A SUIVRE ) 



02/01/2012
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