ICI LONDRES (5)
ICI LONDRES
En mal d’inspiration rongé par la déprime,
Incapable d’écrire le moindre bout de rime,
J’ai saisi d’un seul jet, au prix d’un dur labeur,
Dix mille mots du Larousse dans mon ordinateur.
En vrac au fil des pages de l’encyclopédie,
J’ai traqué les mots rares qui comblent l’érudit,
Les mots savants et justes, les mots qu’on catapulte,
Les mots doux qu’on susurre, les gros mots qu’on éructe,
Les mots qu’on ne mâche pas, mots de passe ou mots clé,
Les mots bleus, les grands mots, les mots acidulés,
Les mots couverts qu’on pèse ou qu’on dit à demi,
En un mot comme en cent, dix mille mots choisis.
Connaissant les arcanes du microprocesseur
Je l’imaginais mal en versificateur
J’ai lancé le programme non sans quelque anxiété
En caressant l’espoir que le monstre accoucherait
De sonnets délirants ou de quatrains baroques :
Salmigondis de mots, galimatias loufoque.
J’escomptais pour le moins des rimes insolites,
Des vers de mirliton dopés au bakélite :
J’ai déchanté bien vite, point de poème épique,
J’ai eu droit au crincrin d’une boite à musique
Qui débitait en boucle, trois notes lancinantes
Tandis que sur l’écran, en lettres ondoyantes
Rythmés et cadencés par ce son de crécelle,
Apparurent deux vers qui depuis m’interpellent :
Les sanglots longs des violons de l’automne
Blessent mon coeur d’une langueur monotone.
ETONNANT NON ?
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